L’association des Français d’origine arménienne et de leurs amis dans le grand Ouest de la Bretagne aux pays de Loire                           Parmi les multiples expressions d'une ardente dévotion au christianisme, la tradition des khatchkars  constitue une contribution très originale du peuple arménien à l'art religieux du Moyen Âge.       "Croix-pierre", sens littéral du mot, le khatchkar est, en réalité, une stèle ornée d'une croix  sculptée sur la face orientée. Il se situe dans la continuité des diverses formes de croyances antérieures ancrées  dans le roc du pays arménien : mégalithes préhistoriques, vichaps, stèles de l'Ourartou puis de l'Arménie païenne.  A l'ère chrétienne, ces stèles deviennent khatchkars pour la vénération de la Croix. En 884, après trois siècles de  domination arabe, le prince Achot est couronné roi d'Arménie sous le nom d'Achot Ier. Ce représentant de la  lignée des Bagratouni restaure ainsi une souveraineté abolie depuis 428 par la Perse sassanide. Son règne se  traduit par une remarquable renaissance économique, culturelle et religieuse. C'est à cette époque que l’on situe  l’apparition des premiers khatchkars datés. Ils sont créés pour commémorer des évènements importants :  fondation d’édifices religieux et publics, restauration de la paix etc. Érigés comme pierres tombales dans les  cimetières mais aussi en de multiples lieux, ils reçoivent, dans le silence, les confidences et les espérances des  fidèles. Leur protection est demandée aussi pour conjurer le « mauvais œil » et les influences maléfiques qui  menacent la famille, les animaux ou les récoltes à venir  .     La période archaïque  Dans la période initiale archaïque (photo 1), du 9ème  au 11ème siècle, ce  sont les débuts de l’élaboration esthétique. Le premier khatchkar daté avec certitude est celui que fait élever, en  879 à Garni, Katranidé l'épouse d'Achot Bagratouni. Sa façade, plate et rectangulaire, comporte une croix  simplement dessinée par un sillon profond incisé dans la masse. Le khatchkar de Tékor (964) présente, par contre,  une croix sculptée et saillante dans un cadre évidé. Parmi les formes anciennes on trouve souvent une forme  ovalaire ou en fer à cheval. La croix possède une longue branche inférieure et des extrémités bilobées (plus tard  trifurquées). Elle idéalise l'arbre de Vie avec, en haut de chaque côté, des fruits (grappes de raisin, grenades)  appendus à une tige née du sommet de la branche supérieure ; la partie inférieure comporte une pyramide, à  degrés, des feuilles stylisées, issues de la base et remontant de chaque côté ou deux petites croix en symétrie  (khatchkar à triple croix). (photo  1)        La période classique  Du 11ème au 14ème siècle on assiste à l’évolution vers le modèle classique  (photo 2): une dalle épaisse, rectangulaire ou légèrement évasée vers le haut. Fixée sur son socle par un  assemblage à tenon et mortaise elle atteint deux mètres ou plus de hauteur. Sa partie supérieure est ornée d’une  corniche ouvragée, horizontale, concave et en surplomb au dessus de la façade. Typiquement, celle-ci comprend, de  haut en bas, un cadre rectangulaire dans lequel est incluse la croix puis, au dessous, le disque, source de  germination. De chaque côté, les bordures du cadre comportent une série de motifs, entrelacés ou superposés ;  dans le cadre, la croix prend son aspect définitif avec le symbole de la trinité à chacune de ses huit extrémités. La  surface qui entoure la croix et les autres motifs va être comblée par de fins entrelacs à type de ruban, de motifs  végétaux ou de vannerie. D’importantes figurations ornent parfois l’ensemble : au niveau de la corniche,  différentes scènes telles que la Vierge à l'enfant, le Christ en majesté ou une Déisis ; tout en bas, au niveau du  socle, l’éventuelle présentation du commanditaire. Certains chefs-d'œuvre, d'une virtuosité extrême, reproduisent  dans la pierre, les motifs traditionnels de la dentelle à l'aiguille (photo 3). Durant cette période on trouve, en  outre, une variante exceptionnelle où la croix est remplacée par une scène de dé-crucifixion du "Sauveur de tous"  (Amenap'rkitch) (photo 4).        De nos jours   Après avoir atteint son modèle canonique le khatchkar perdure au fil des siècles. En  république d’Arménie et en diaspora, chacun d’eux, unique par tradition, atteste dans la durée une présence  arménienne passée ou actuelle. Véritable symbole identitaire, le khatchkar est le veilleur de pierre de la mémoire  collective du peuple arménien.   LE BLOG NOIR ? © menezarat.fr   Khatchkars, la foi et la pierre. par Arthur Hadjian       Photo 1 khatchkar archaïque à triple croix (Etchmiadzin)                        Photo 2 khatchkar du XIII siécle  (monastére de Kécharis  Photo 3: khatchkar “Armenap kitch”                                                                                                       Photo 4 khatchkar dentelle de pierre sculpteur Vahram - 1273                                                                                                                        sculpteur Poghos -1291 Article paru dans Azad magazine, reproduit ici avec l’aimable autorisation de l’auteur A Hadjian                                                            Note additionnelle 17 novembre 2010 L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) a déclaré les khatchkars arméniens  comme un patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente.  Les  khatchkars sont décrits comme des «stèles taillées dans la pierre en plein air" par des artisans en Arménie et la diaspora, et, qui sont  utilisés comme points focaux pour le culte, pierres tombales, et des reliques afin de «faciliter la communication entre le profane et le divin."  Ces pierres sculptées à la main, sont d’environ jusqu'à 1,5 mètres de hauteur avec une croix ornementale gravée sur le symbole d'un soleil ou  la roue arménienne de l'éternité et généralement accompagnée par des sculptures de saints, d'animaux ou d'autres motifs géométriques.  Le rapport fournit un compte rendu détaillé du processus d'élaboration. Les «Khatchkars sont créés en général avec la pierre et gravé à l'aide  de ciseaux, stylos pointus et des marteaux. Les sculptures sont ensuite broyées à l'aide de sable fin. Le document souligne aussi le caractère national de l'artisanat des Khatchkars, qui est "transmis par les familles ou de maître à apprenti, de  l'enseignement des méthodes traditionnelles et les modèles, tout en encourageant les particularités régionales et  l'improvisation individuelle."  Selon l'application, chaque Khatchkar est tout à fait unique, avec son propre modèle et le design. Il ya plus de 50.000 khatchkars en Arménie  avec des milliers d'autres dans le monde, en diaspora et sur les territoires historiques de l'Arménie dans la Turquie actuelle, l'Azerbaïdjan et  'Iran.  Une fois le Khatchkar  terminé, une petite cérémonie religieuse a lieu de consacrer le nouvel édifice Khatchkar. Une fois béni et oint, le  Khatchkar est censé "possèder des pouvoirs sacrés et peut fournir de l'aide, la protection, la victoire, longue durée de vie, du souvenir et de  médiation vers le salut de l'âme», explique le rapport.